Dire ou écrire ? D’ici et d’ailleurs
Au début de cette année, je souhaitais évoquer principalement deux sujets, lesquels auraient été développés et complétés ultérieurement, notamment lors des stages sur « Les Besoins Fondamentaux du Cheval ». Le premier thème est toujours d’actualité, celui des maladies émergentes : métaboliques, infectieuses, dégénératives … leurs origines, la diversité de leurs manifestations, nos moyens d’action, nos capacités à créer de nouveaux équilibres, ou mieux, à remédier définitivement aux causes profondes qui en sont à l’origine.
Le second thème concernait certains changements ou aménagements des modalités de communication (conseils, commandes …) entre Ohm et les personnes engagées dans une relation responsable avec les espèces animales domestiques en co-évolution, tout particulièrement ici les équidés, afin de gagner en efficacité sans pertes de temps inutiles (recherche des Codes client …).
Sur ce point, une évolution est imminente, avec l’accueil d’une nouvelle personne pour le secrétariat, disponibles quatre demies journées / semaine, dont les coordonnées seront annoncées dès que possible.
En lien, et en ce qui me concerne, je serai amené à poursuivre l’activité conseil au cours de voyages à l’étranger, ce qui impliquera une communication soit par mail, soit par téléphone par le biais de WhatsApp (donc télécharger l’application et utiliser un réseau wifi).
Ce qui nous renvoie au titre de cet Editorial, « dire ou écrire ».
Je ressens depuis longtemps une très nette prédilection pour la transmission orale, ce qui est quotidien par le conseil téléphonique, et ponctuel lors des stages.
Ce que je souhaite partager ici, c’est mon expérience, mon ressenti, ma réflexion, concernant ces deux façons fort différentes de communiquer, d’aller à la rencontre de l’autre, de transmettre, de partager …
J’ai beaucoup écrit. J’ai traversé ce temps très exigent de l’écriture, le temps consacré à rassembler, à mettre en ordre des documents, pensées, savoirs, souvenirs, expériences … le temps consacré à rédiger, lire et relire, corriger, publier, distribuer … ce temps multiple, ce temps interminable, que l’on vole à sa famille, à ses amis, à soi-même … et pour l’avoir traversé, je sais aujourd’hui que cela ne correspond plus à mes besoins fondamentaux.
A qui s’adresse-t-on lorsqu’on écrit ? A des inconnus, que l’on souhaite nombreux, des personnes dont on ne verra sans doute jamais le visage … Qu’espère-t-on lorsqu’on écrit ? laisser une trace accessible au plus grand nombre, une trace comme l’empreinte d’un pas, figée, intangible, mais qui survit à celui qui a posé le pied … Une mémoire, qui survit à celui qui a témoigné …
J’ai beaucoup lu aussi, et cela m’a permis de rencontrer des personnes très éloignées dans l’espace et le temps, des personnes qui ont quitté ce monde en laissant une trace …
Et j’ai aussi beaucoup parlé. Et beaucoup écouté. La trace des mots dits (mots bénis!) est plus fugace, pour une bonne part enfouie dans l’inconscient, inaccessible à un besoin immédiat, mais ô combien plus profonde, bouleversante, et de ce fait déterminante, transformatrice, génératrice de prises de conscience, d’évolution ! J’ai croisé des regards, observé ou adopté des postures en relation avec les émotions de l’orateur, partagés des temps de convivialité intense, des larmes, des rires …
Voici les maitre-mots : partage du savoir-faire, convivialité du savoir-vivre, du savoir-être ensemble, ici et maintenant.
L’écriture est un temps de solitude. Une « Traversée en solitaire » (Marie Madeleine Davy). Que je serais presque tenté d’inclure au « spectre autistique » ! L’autre recevra une réflexion, une émotion figées, qui ne sont peut-être plus d’actualité. Où est aujourd’hui celui qui a laissé cette empreinte, que ressent-il ? La trace du pas est là, l’encre sur la page, qui dit une vérité qui fut. Quelle est ma vérité aujourd’hui, enrichie d’un vécu intense jour après jour, déjà si loin au-delà des mots publiés et laissés derrière soi ?
Dans un monde en perpétuelle métamorphose, un monde d’émergence et de transformation rapide, dire, se dire, est un temps de rencontre vraie où l’émotion en direct est possible. Un véritable « moment » présent, dont la trace est propre à chacun.
Dès lors je vous invite à ces rencontres « de vive voix » autour des Besoins Fondamentaux du Cheval, qui nous permettent de contacter avec sincérité nos propres besoins, nos attentes, de partager nos expériences bien souvent frustrantes, douloureuses, et dès lors sortir de l’isolement, de ces « traversées en solitaire » que sont nos quotidiens auprès de chevaux accompagnants, eux aussi, trop souvent, des individus en souffrance, en exil, dont le mal-être nous dit tout des environnements dans lesquels eux et nous tentons de survivre.
Là nous pourrons évoquer ces maladies émergentes qui nous préoccupent, ces maladies pleines de sens qui toutes parlent de nous, de nos errances, de ce monde de l’Anthropocène que nous avons co-créé, et là sans doute nous pourrons commencer à devenir responsables, là sans doute nous pourrons trouver le courage d’infléchir la trajectoire et générer des espaces vivifiants et durables pour toutes les espèces en co-évolution. A très bientôt donc, de vive voix !
Eric Ancelet
Docteur Vétérinaire